GARDOUCH
village lauragais
La croisade "albigeoise"
1208 à 1250
La croisade contre les Albigeois a nourri des centaines de livres.
En voici une chronologie qui se veut impartiale, logique, éloignée du lyrisme habillant encore bon nombre de commentaires sur le sujet.
Qui sont les protagonistes ?
Les suzerains régionaux : donc les comtes de Toulouse et tous leurs vassaux. Au fil des années ils ont bâti un grand "royaume du Midi". Il fait ombrage à l’autorité royale du Nord.
Les Cathares : leur religion s’est développée sur les terres des précédents. Voir la fiche Catharime, dans : enquêtes / dossiers / catharisme.
La Papauté : elle regarde d’un très mauvais œil germer une telle dissidence.
Les rois Capétiens : ils commencent à avoir des tentations "sudistes" et rêvent de reconstituer un grand royaume ; ils vont guerroyer, guidés par les Papes.
Les Anglais : c’est curieux, peu en parlent, mais il est bon de rappeler qu’ils ont suzeraineté sur le duché d’Aquitaine, proche des portes de Toulouse. L’affaiblissement des comtes n’est pas pour leur déplaire : ils vont donc regarder le bon peuple de France se déchirer et ils vont compter les coups, en silence.
Bien évidemment, la plus grande partie des luttes va se passer directement "chez nous".
Nos villages seront les témoins directs de batailles, de pillages et d’assassinats. Au gré des victoires ou des défaites, il y aura flux et reflux de guerriers.
En 1208
Assassinat du légat du pape, Pierre de Castelnau, par un écuyer du comte de Toulouse Raymond VI, près d’Arles, à Saint-Gilles, sur les terres de ce dernier. C’est l’étincelle.
Le pape Innocent III décrète l’excommunication de Raymond VI, fait déclencher la croisade, et livre le midi à la proie des croisés.
De 1209 à 1215 : première "croisade"
La première armée croisée est constituée par des troupes menées par des barons du Nord. Elle descend la vallée du Rhône, pénètre en Provence sur les terres du comte Raymond VI et s’en prend à tout ce qui résiste.
Juillet 1209 : prise de Béziers, célèbre massacre.
Août 1209 : prise de Carcassonne. Raymond-Roger Trencavel, vicomte et vassal de Raymond VI est prisonnier et meurt au cachot. Il est dépossédé de ses titres et territoires. Simon de Montfort se fait désigner comme chef des croisés et nouveau vicomte de Carcassonne, du Razès, d’Albi et de Béziers.
1210 à 1215 : conquête progressive des places du Midi. En 1211, Lavaur tombe et il s’ensuit un célèbre massacre. En 1213, à Muret, Raymond est défait et son beau-frère et allié, le roi d’Aragon, tué. En 1215, Montfort reçoit la soumission de Toulouse. Le concile de Latran (1215) confirme Montfort dans ses nouveaux titres : comte de Toulouse, vicomte de Carcassonne et du Razès, etc.
De 1216 à 1225 : révolte du Sud
1216 : le fils de Raymond VI, futur Raymond VII, défait les troupes croisées à Beaucaire pendant que Toulouse se soulève. Et en 1217, Raymond VI reprend Toulouse.
Montfort en fait le siège en 1218 et y trouve la mort. Son fils Amaury va lui succéder.
1219 : entre Baziège et Montgiscard, bataille locale où les lieutenants d’Amaury sont défaits et pourfendus.
1220 : le comte de Foix est assiégé à Castelnaudary par les croisés d’Amaury qui est contraint de lever le siège en mars 1221, devant sa longueur. Il se réfugie à Carcassonne.
1222 : mort de Raymond VI. Une à une, les places sont reconquises par son fils Raymond VII et le comte de Foix : Montréal, Fanjeaux, Limoux, Pieusse. Et Mirepoix (1223).
1225 : Raymond II Trencavel (fils du feu Raymond Roger) reprend Carcassonne.
De 1226 à 1229 : croisade "royale"
1226 : la reconquête s’amplifie. Le roi de France, alors Louis VIII, décide de lever une armée. Elle soumet Avignon, puis chasse Raymond II Trencavel (allié du comte de Toulouse) de Carcassonne. Louis VIII meurt au retour de cette expédition.
1229 : il y a un semblant de paix. En effet, Raymond VII, sentant le déséquilibre jouer contre lui, accepte un pis-aller. Par le traité de Meaux (ou de Paris) il se soumet à Louis IX, nouveau roi de France, et fait pénitence sur le parvis de Notre Dame.
Ainsi : il perd ses droits sur les territoires allant de la Provence à Carcassonne. Il promet et donne son unique héritière, Jeanne de Toulouse, en mariage à un frère du roi : Alphonse de Poitiers. Mais il est confirmé dans son titre de comte de Toulouse et garde autorité sur l’Agenais, le Quercy, le Rouergue et le Toulousain.
Conséquence : le Languedoc devient rattaché de manière directe et indirecte à la couronne de France, mais Raymond VII conserve des droits sur la moitié de ses territoires, ce qui n’est pas rien. On peut se poser dès lors la question de sa défaite : ne serait-ce pas une demi-victoire ?
D’autant qu’il mettra peu d’empressement à appliquer tous les termes du traité !
L’inquisition et la fin du catharisme
Le traité prévoit aussi la poursuite de la lutte contre l’hérésie avec l’organisation de l’inquisition dans le Midi et de la traque des hérétiques. C’est la dernière étape de l’affaire albigeoise.
1231 : le pape Grégoire IX crée l’Inquisition. Son action dans le Midi ne fait pas preuve d’une grande réussite, jusqu’en 1242. Les cathares se réfugient dans des sites difficilement prenables.
Mai 1242 : un fait nouveau va accélérer les évènements. Le tribunal d’inquisition est réuni à Avignonet. Une expédition est mise sur pied : elle est certainement commanditée par Raymond VII qui cherche à faire soulever le Midi contre la couronne. Une troupe de conjurés quitte Montségur sous le commandement de Pierre Roger de Mirepoix, est guidée à Avignonet par Raymond d’Alfaro, neveu du comte de Toulouse. De nuit, les inquisiteurs et leur suite, abrités dans le château d’Avignonet, sont tous massacrés.
La suite est bien connue : le soulèvement général escompté ne se produit pas. Les alliés de Raymond VII font défaut. Le roi d’Angleterre débarque trop tard en Charente et ses troupes y sont vaincues à Taillebourg. L’armée du roi de France réinvestit le Languedoc. Par crainte, le comte de Foix abandonne Raymond et fait soumission au roi.
1243 : Raymond VII se retrouve esseulé et capitule. Paix de Lorris (dans le Loiret) où Raymond et Saint Louis signent un traité de paix enfin durable.
1244 : après un siège de 10 mois, la citadelle de Montségur tombe : c’est le début de la fin. Peu à peu les derniers points de résistance tomberont à leur tour (châteaux des Corbières).
1249 : mort de Raymond VII. Sa fille Jeanne devient comtesse de Toulouse. Mais mariée au frère du roi depuis 1237, le comté de Toulouse tombe de facto sous la tutelle des rois de France.
1255 : fin des luttes (prise du château de Quéribus).
Les conséquences
En premier lieu, l’assise des rois de France dans le Midi. C’en est fini de la toute puissance des comtes de Toulouse. Leurs territoires sont morcelés.
Le début de la disparition programmée de la langue d’oc, dialecte officiel de l’Occitanie.
La fin de l’hérésie cathare. Subsistera tout de même une tendance marquée pour la contestation.
La paix "capétienne ".
L’apparition de nouvelles agglomérations, bastides en tout genre, qui se développent le long des voies importantes de communication et à leur carrefour : Villenouvelle, Villefranche, Saint Félix, Revel, Labastide d’Anjou, Nailloux, Calmont, Montgeard etc.
La confirmation de la toute puissance de l’église catholique romaine.
Nous voici arrivés pratiquement en 1255.
Il est intéressant de regarder ce qui a pu se passer à Gardouch pendant cette période agitée.