GARDOUCH

village lauragais

L’invasion sarrasine



Résumé des épisodes précédents

Le secteur a été envahi par les Celtes, puis par les Celtes Tectosages. Mais bien avant, les basques avaient pu passer.

La civilisation gallo-romaine s’est ensuite développée ; les Wisigoths se sont installés durablement ; ils furent chassés par les Francs.

Les gardouchois de vieille souche sont les descendants de tout ce brassage.

Jusque vers l’an 1000, il n’existe aucune trace réelle de l’existence de Gardouch.

Une très forte présomption : des centres de vie se sont établis sur les collines  de Gardubium devenu Gardog. Ils se sont forcément organisés en communautés, et comme partout, il devait bien y avoir un chef, plus tard seigneur.

Le centre principal ne pouvait se trouver que sur une hauteur : soit aux alentours des ruines du château, proche de l’église actuelle ; soit vers le coteau de Pecholière-Ornolac-Cammas.


Nous sommes en 720. L’invasion sarrasine dans notre partie du Lauragais est un bien grand mot ; elle y est éphémère ; elle a laissé peu de traces.


Une théorie voudrait que tous les noms en maur (Montmaur, Maurin, Maurel, etc.) aient pour origine les envahisseurs maures. Elle est fausse.

La racine locale maur vient du latin maurus (brun, sombre). C’était la couleur naturelle des collines boisées.

Pour la même raison les latins avaient qualifié les habitants d’Afrique de Mauri, en raison de leur peau plus sombre.

Les Montmaur, Maurel, Maurin ou autres Maurand étaient ainsi appelés parce qu’ils étaient bruns. Tout simplement.


Un peu avant 700, il existe à l’ouest du Languedoc, entre Loire et Pyrénées, une entité politique et géographique : le duché d’Aquitaine (ou de Gascogne).

Capitale Toulouse. Gardog fait partie de ce duché.

Ce duché trouve son origine dans la partition du royaume franc-mérovingien (donc des successeurs de Clovis).

A sa tête : Eudes d’Aquitaine né vers 650, d’origine non franque et sans doute vasconne (basque).

Proclamé duc d’Aquitaine entre 680 et 700, il décèdera en 735. Il aura des relations variables avec ses voisins du nord de la Loire et notamment Charles (dit Martel) : tantôt ils s’allieront, tantôt ils se disputeront.

C’est essentiellement Eudes qui aura maille à partir avec les Sarrasins, puisqu’ils seront ses voisins pendant quelques années.


Venus par l’Espagne, les Sarrasins s’implantent en 719 à Narbonne (Septimanie) : ils commencent vers 720 des tentatives d’expansion vers l’ouest, c'est-à-dire Toulouse, par la voie lauragaise. Donc à deux pas de chez nous.

D’où diverses rencontres guerrières avec notamment Eudes d’Aquitaine et ses vascons.

Les avis des historiens divergent sur les lieux, le nombre des combats et leurs dates.


Il y a unanimité pour affirmer qu’aux environs de Toulouse, les troupes sarrasines auraient été défaites à plusieurs reprises à partir de 721.

La première rencontre est présumée avoir eu lieu entre Castanet et Toulouse, en juin 721.

Certains historiens affirment que c’était au pied des murs de Toulouse, qui faisait l’objet d’un siège ; d’autres disent entre Muret et Toulouse, d’autres parlent de Martres-Tolosane.

Les sources sont surtout des « chroniques » musulmanes. Il convient de s’en méfier : elles rapportent que les forces en présence étaient de l’ordre de 6 000 à 7000 combattants de chaque côté. C’est énorme et difficilement crédible.

Cela voudrait dire que la région était face à une véritable invasion. Or la plupart des analystes sont d’accord : la technique de progression sarrasine était constituée dans un premier temps par une succession de raids violents (rezzous), suivis bien entendu par une occupation organisée du terrain.

C’est ce qui a été réalisé dans la région de Narbonne, avec une installation durable.

Pas dans le midi toulousain. Pas sur la voie lauragaise où les localités (Baziège, Avignonet et Montferrand, Bram) ne présentent aucun vestige d’une telle occupation.

Dans tout les cas les agresseurs ont utilisé la route de Toulouse, l’ancienne voie romaine, pour essayer de progresser : ils sont passés à deux pas de Gardog.


Selon les manuscrits d’Odette Bedos (Gardouch, tome 1, p 64), un chevalier dit Raymond de Varagne aurait participé au fameux combat des environs de Toulouse. Ce serait la première apparition des Varagne dans le secteur. Nous le verrons plus tard, les Varagne joueront un rôle capital dans l’histoire de Gardouch.


Il est raisonnable de penser que les premières fortifications sérieuses de Gardog ont été construites à cette période.

D’abord un fort dit fort de Gardog supra, perché dans le secteur de  la colline de Pécholière.

Sa situation permettait de surveiller l’axe du Lauragais (Avignonet-Baziège) et les vallées de l’Hers et du Gardijol, puis d’abriter momentanément les populations voisines.

Les matériaux utilisés : briques et rocs argileux locaux.

Ensuite un fort de plaine, appelé fort de bas situé entre Hers et Gardijol ; on estime sa position en bordure de forêt, au débouché de la route de l’Hers, proche d’un gué. Dans le périmètre de l’actuel lotissement de l’écluse.

Le cadastre dit de Napoléon (1824) mentionne cet édifice disparu aujourd’hui : des vestiges existaient par conséquent encore au début du XIX°.

Selon le plan cadastral, il s’agit de toute évidence d’un ancien fort pourvu de deux tours qui faisaient face au sud-est.

Une liaison souterraine devait exister entre le fort du haut et le fort du bas : il en demeure une trace, trou d’effondrement encore visible aujourd’hui (en 2012), sur la gauche du chemin de terre entre Ornolac et Borde Basse, au commencement de la descente.

Il est possible qu’à la même période ait été édifiée une troisième fortification : sur la hauteur du pech,  au-dessus de l’église actuelle, proche des ruines du château. Il ne s’agit ici que d’une présomption. Pas de trace et le château viendra plus tard.


En 732, les mêmes Sarrasins, prenant soin d’éviter Toulouse, font plusieurs poussées vers le Nord.


L’une est dirigée vers Bordeaux où les troupes d’Eudes sont vaincues. Ils poussent alors vers le Poitou où ils sont stoppés par une alliance retrouvée entre Eudes et Charles duc d’Austrasie (pas encore devenu Martel) entre Tours et Poitiers.

In fine la progression est définitivement stoppée dans l’Ouest et le Sud-Ouest : les envahisseurs se replient sur leur base de Narbonne.


L’autre, de Narbonne et de la Provence, remonte vers  la vallée du Rhône jusqu’en Bourgogne, vers 735.

Mais Charles (surnommé désormais Martel en raison de la violence des coups assénés à Poitiers) les repousse vers le Sud et réussit à les chasser des places fortes qu’ils occupaient en Provence, entre 736 et 739. Ils retournent sur Narbonne.


A la mort de Charles Martel en 741, un de ses fils Pépin le Bref lui succèdera.

Il se fera élire roi des Francs en 751, poursuivra la politique d’unification des duchés et royaumes dont son père était suzerain de fait et chassera en 759 les Sarrasins de Septimanie et de Narbonne. Ces derniers se replieront en Espagne.

Un peu plus tard il prendra le contrôle de l’Aquitaine (vers 761).


Il meurt en 768 et son fils Charles, futur Charlemagne lui succède.

Pendant son règne (768 à 814) le royaume franc est agrandi et transformé en empire. Il est aussi remarquablement organisé.

Charles Martel, Pépin le Bref et enfin Charlemagne avaient su mettre en place une organisation territoriale où le représentant désigné du roi ou du suzerain devait hommage en échange des territoires dont il recevait la responsabilité.

Cette organisation nous ramène à l’histoire de notre Midi et en particulier celle de notre Languedoc.


Car c’est ici que commence l’histoire des comtes de Toulouse, puis de leurs amis, compagnons d’armes, et vassaux, les Varagne.